Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, très probable candidat à l’élection présidentielle d’août prochain, envisage de faire campagne dans plusieurs pays d’Europe auprès des électeurs expatriés de Turquie. Selon les médias turcs, la campagne d’Erdogan commencera par un meeting le 24 mai 2014 à Cologne.

Ce premier rassemblement des partisans d’Erdogan se tiendra la veille des élections pour le Parlement européen qui auront lieu le dimanche 25 mai dans plusieurs pays membres dont l’Allemagne et la Belgique.

Erdogan souhaite ensuite se rendre dans plusieurs villes d’Allemagne ainsi que dans les pays voisins abritant également d’importantes communautés turques.

Les missions diplomatiques turques et les organisations proches du pouvoir islamiste ont déjà mobilisé tous les moyens pour assurer un vote massif en faveur d’Erdogan et essaient d’obtenir un soutien logistique pour le scrutin des autorités des pays d’accueil.

Disputé pour la première fois au suffrage universel direct, le scrutin sera également ouvert, autre première, au quelque 2,7 millions de ressortissants de Turquie en âge de voter vivant à l’étranger, dont 1,4 million en Allemagne.

Avant la nouvelle loi votée en 2012, seuls 5 à 7% de ces électeurs votaient et ce dans les postes de douane aux frontières de la Turquie, selon les chiffres fournis par les autorités électorales.

Le scrutin présidentiel se déroulera en Turquie le 10 août pour la première fois au suffrage universel direct. Un deuxième tour, si nécessaire, est prévu le 24 août.

Toutefois, le vice-premier ministre Emrullah Isler a annoncé que le scrutin aura lieu dans les pays européens les 31 juillet-3 août pour la première fois, avec un deuxième tour, si nécessaire, les 17-20 août 2014.

(Voir: Comment voter depuis l’étranger aux prochaines élections en Turquie ?)

Selon les chiffres fournis par le Conseil supérieur électoral (YSK), le nombre des expatriés de Turquie qui peuvent voter à l’étranger s’élève à 2,7 millions dont 1.380.909 se trouvent en Allemagne, 293.412 en France, 238.968 aux Pays-Bas et 126.423 en Belgique.

Electeurs expatriés dans les autres pays:

Autriche: 104.536
Chypre du Nord: 91.177
Suisse: 87.085
USA: 85.941
Royaume-Uni: 77.137
Australie: 38.923
Suède: 34.921
Danemark: 30.569
Arabie Saoudite: 28.703
Canada: 20.313
Italie: 12.956
Russie: 11.572
Grèce: 10.195
Bulgarie: 8.198
Norvège: 7.636
Roumanie: 6.071
Azerbaidjan: 8.907
Israël: 7.574

Toujours selon la même source, il n’y a qu’un électeur dans chacun des pays suivants: Sierra Leone, Iles de Comores, Mauritanie, Zambie, République d’Afrique centrale, Guyana, Trinité et Tobago, Bhoutan et Brunei.

Les communes belges au service des élections turques?

En Belgique, les missions diplomatiques turques avaient déjà sollicité le soutien logistique des autorités belges. La ministre de l’Intérieur Joëlle Milquet avait tout de suite demandé aux communes d’organiser les élections présidentielles turques de juillet 2014 en mettant des locaux publics à disposition comme des écoles, du matériel comme des isoloirs et des chaises et du personnel (fonctionnaires et policiers) . Elle a précisé que “comme il s’agit pour les autorités turques de la première organisation d’un scrutin à l’étranger; celles-ci ont sollicité un certain soutien des autorités belges (…) Il s’agirait de 20 à 60 bureaux de vote au total en Région de Bruxelles-Capitale”.

La sénatrice PS Fatiha Saïdi, par ailleurs échevine à Evere, a posé à ce sujet une question parlementaire le 26 juin 2013.

Dans sa réponse du 13 décembre 2013, la ministre de l’Intérieur Joëlle Milquet a déclaré: “Les ambassades et consulats turcs en Belgique participeront bien à l’organisation de ces élections turques et des bureaux de vote devraient normalement y être établis. Ces autorités turques se chargeront bien entendu de toutes les communications avec leurs ressortissants (convocations, …). Comme il s’agit pour les autorités turques de la première organisation d’un scrutin à l’étranger, celles-ci ont sollicité un certain soutien en vue d’éventuellement organiser des bureaux de vote dans des locaux publics. Ces autorités se sont donc adressées à ce sujet à leurs homologues aux Pays-Bas, en France, en Allemagne, en Belgique, … . C’est dans un esprit de coopération internationale que j’ai donc transmis mon courrier du 15 mai dernier aux communes citées plus haut.” (http://www.info-turk.be/425.htm#communes)

Toutefois, la coïncidence de la campagne électorale pour la présidence de la république turque avec le triple scrutin (fédéral, régional et européen) en Belgique semble très favorable pour les partisans d’Erdogan. Etant donné que les électeurs expatriés de Turquie sont en grande partie également électeurs dans les scrutins belges, les dirigeants des partis politiques belges n’hésitent pas à satisfaire n’importe quelle demande en provenance des représentants du gouvernement d’Erdogan.

L’exemple le plus spectaculaire de ce soutien était l’autorisation donnée par La Ville de Bruxelles aux partisans d’Erdogan de se réunir en meeting vers minuit à la place Stéphanie à Bruxelles le 20 janvier 2014. Ce privilège reconnu au leader d’un parti politique étranger en interdisant même la circulation des trams pendant ce meeting avait suscité beaucoup de réaction de la part des usagers.

On n’oublie pas comment certains partis politiques ont pratiqué la politique de la chaise vide au Parlement francophone bruxellois (Cocof) pour éviter de se prononcer sur la proposition de résolution du député Ecolo Jean-Claude Defossé visant « le respect de la liberté de la presse en Turquie », un texte qui aurait pu déplaire à leur électorat d’origine turque. (Voir: http://www.info-turk.be/428.htm#AJP)

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