Certes l’opposition est toujours aussi agressive et virulente, mais, en ce faisant, elle démontre qu’elle est de moins en moins crédible, car est-ce normal que ce soient les partis de la « gauche nationaliste » qui se révèlent être les plus « réactionnaires » dans cette ouverture d’un processus démocratique pour rencontrer les attentes des Kurdes qui représentent, rappelons- le, plus d’un cinquième de la population.

Dans les journaux turcs, on parle clairement de « printemps kurde », ce qui, il y a quelque temps, aurait été incroyable. Cela prouve que la Turquie abandonne petit à petit les « diktats » imposés par le fondateur du pays, Mustapha Kemal. La Turquie comprend enfin qu’elle ne pleut plus stagner dans une philosophie politique qui date de presque un siècle et ce qui est paradoxal c’est que ce soit un parti religieux comme l’AKP qualifié par certains observateurs occidentaux de conservatisme obscurantiste qui a le courage de chercher à résoudre un problème qui empoisonne le vie politique et sociale de la Turquie, sans oublier les dégâts et les crime commis, depuis des décennies.

Certes, dans les conditions préalables d’adhésion à l’Union Européenne à laquelle la Turquie s’est portée candidate, il est clairement stipulé,entre autres, que le Droit des minorités doit être respecté. Il est donc évident que le déni d’existence vis-à-vis de la communauté kurde qui perdure depuis des décennies n’est ni acceptable ni supportable par cette même Union. Cependant, on reste très conscient que dans son état politique actuel, l’UE aurait été capable d’oublier ses « grands principes démocratiques » dans la perspective d’augmenter son potentiel avec l’adhésion d’un pays économiquement prometteur et aussi important dans la géopolitique que la Turquie. C’est donc bien l’AKP qui a décidé, quel que soit son avenir dans l’UE, de s’atteler à une réforme décisive pour le bien du pays.

Certes, la polémique est toujours présente au sein de la classe politique, mais les critiques de l’opposition nationaliste et les réticences de l’armée – liées à la crainte de perdre une partie de son pactole budgétaire si le calme régnait dans le Kurdistan de Turquie – n’ont pas freiné la décision du gouvernement de chercher une solution acceptable par toutes les parties.

Il est évident qu’actuellement aucun plan concret n’a été présenté, mais l’atmosphère actuelle qui permet à tout un chacun de donner son avis sur la question kurde prouve que le gouvernement a pris la bonne direction et a des chances de mener à bien le processus d’ouverture. Cela a été faire preuve de bon sens de la part du gouvernement de ne pas dévoiler son plan, car s’il avait dû en discuter avec l’opposition kémaliste nationaliste, cela aurait provoqué une fois de plus un climat frisant le soulèvement puisque ces partis auraient fait sortir dans la rue les foules fanatisées par des slogans trompeurs et d’un autre âge. Le débat aurait été une lutte de chiffonniers attisant la violence.  

« Cette violence doit cesser et le sang s’arrêter de couler, il faut que les citoyens d’origine kurde puissent enfin recouvrer leurs droits légitimes et leur liberté ». Cet extrait du journal « Radikal » sous la plume de Cengiz Candar démontre à merveille que l’ambiance a changé.

Un célèbre romancier d’origine kurde, Yachar Kemal, témoigne: « Si des Turcs ou des Kurdes prononcent encore des paroles et commettent des actes provoquant les tensions dans le pays, ils auront une lourde responsabilité que l’Histoire jugera sévèrement. » Rappelons cependant que l’opposition reste véhémente, il sufit pour le comprendre de citer les propos d’un « intellectuel kémaliste » dans le quotidien « Cumhuriyet » qui déclare: « Il faut chasser tous les Kurdes de Turquie vers le nord de l’Irak (région autonome kurde) et les remplacer par des Turkmènes d’Irak » et cela rappelle furieusement la « solution finale » génocidaire des nazis. Rappelons, d’ailleurs, que le premier génocide du 20e siècle a été, en 1915-1916, celui des Arméniens et autres chrétiens de l’Empire ottoman , décidé par les « Jeunes Turcs » que Mustapha Kemal n’a jamais désavoués

Ce texte honteux n’a eu aucun écho dans la population ce qui prouve que le climat a changé et que toute proposition fascisante n’a plus aucun écho. Il est vrai que le procès « Ergenekon » a révélé et fait comprendre à la population turque combien ce réseau putschiste menait le pays au fond du gouffre et faisait de la Turquie un pays maffieux peu fréquentable.

Rappelons, également, que, paradoxalement, ce sont des partis dits de gauche qui ont pratiqué pendant des décennies une politique raciste et ultra-nationaliste repliée sur des valeurs fascisantes  et que c’est un parti dit de droite qui a le courage de dépasser le conservatisme de la société pour ouvrir fraternellement sa porte aux Kurdes opprimés depuis des décennies. Droite et gauche semblent, de plus en plus, être des slogans dépassés qui se rattachent à de vieux clichés cloisonnant le monde politique selon des critères d’un autre âge. Il faut préférer le qualificatif de « progressiste » ce qui n’est l’apanage d’aucune philosophie politique préconçue. 

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