Nouveau communiqué de presse des avocats Selma Benkhelifa, Joke Callewaert et Georges-Henri Beauthier qui ont été à Shengal et Maxmur.
Il s’agit d’une mission d’enquête sur l’utilisation de drones turcs contre des civils. 

Fin juillet 2022, l’Irak a déposé une plainte auprès des Nations unies pour la mort de 9 civils tués par des drones turcs à Zakho, dans le nord de l’Irak. Ces attaques turques sur le territoire irakien sont incessantes et ont fait des dizaines de victimes civiles dans la région kurde.

Nous sommes partis en mission pour écouter ces victimes ou leurs familles. A peine de retour, nous apprenons avec stupéfaction que le camp de réfugiés où nous avons été reçus a été victime d’une nouvelle attaque par drones, ce lundi 29 août.

Tout d’abord, nous sommes allés à la rencontre de la population yézidie, une minorité religieuse persécutée et menacée de génocide par Daesh.

Dans le village de Khanesur à Shengal, près de la frontière syrienne, nous sommes immédiatement confrontés à la réalité de cette menace permanente : un drone nous survole.

Les habitants expriment tous leur terreur face à ces tueurs du ciel. Des drones turcs survolent leur village tous les jours.

Nous rencontrons la mère d’un jeune étudiant tué lors d’une frappe sur l’hôpital du village, où des médecins ont également été tués. Nous rencontrons également la mère d’un politicien yézidi qui a été tué dans une frappe visant sa voiture. Puis nous voyons un enfant gravement blessé par une frappe sur le centre communautaire…

Pendant 275 ans (1640 – 1915), les Yézidis ont été massacrés et soumis à des tentatives de génocides dans l’Empire ottoman. Daesh a repris ces massacres. On se souvient des jeunes filles kidnappées et vendues. Pour les Yezidis, le régime d’Erdogan poursuit cette politique génocidaire.  Le peuple s’est battu et a repoussé les assassins de l’État islamique. Aujourd’hui, ils sont confrontés à une nouvelle menace contre laquelle ils se sentent impuissants et sans défense.

Nos visites aux familles des victimes sont bouleversantes et nous laissent avec plus qu’un sentiment d’indignation. Il faut faire quelque chose.

Nous partons ensuite pour le camp de réfugiés de Makhmour, plus à l’est, près de la ville de Mossoul. Ici aussi, les survols de drones turcs sont quotidiens depuis des mois.

Nous rencontrons les habitants du camp. Ils nous expliquent que le camp a été créé en 1997 après que les familles ont été forcées de quitter leurs villages en Turquie, brûlés par l’armée turque. Ces villageois ont fui en 1994 et ont été poursuivis par l’armée turque en Irak. Aujourd’hui, ils ont reconstruit leur vie et leur maison en Irak, au milieu d’un quasi-désert. Ils continuent d’être persécutés par la Turquie.

Les drones turcs les ciblent au motif qu’ils sont des combattants du PKK. Cependant, les victimes sont des civiles comme par exemple une femme de 73 ans dont nous avons rencontré la fille, trois jeunes femmes qui gardaient leur bétail, une jeune fille de 16 ans qui trayait ses moutons, etc.

Le camp de Makhmour est situé à 250 km de la frontière turque et ne peut constituer une menace pour la Turquie.

Nous revenons choqués et indignés par ces meurtres illégaux, illégitimes et impunis. Des poursuites judiciaires en vertu du droit international doivent être engagées, ainsi que des initiatives visant à interdire l’utilisation de drones comme armes de guerre en violation du droit international.

Selma Benkhelifa, Joke Callewaert, Georges-Henri Beauthier.

PHOTOS :

  1. Jeune enfant Yezidi blessé par une frappe de drone le 15/06/2022
  2. Photo 2 et 3 : centre du Conseil populaire des Yezidis frappé par un drone le 15/06/2022
  3. 4 femmes tués par une frappe de drones à Makhmour
  4. Maman d’une jeune fille tuée par drone à Makhmour

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